Auteurs: Séverine Martel

En droit français, le licenciement d’un salarié investi d’un mandat électif et/ou syndical est subordonné à l’autorisation préalable de l’Inspection du Travail.

Lorsque la demande de l’employeur d’autoriser le licenciement était fondée sur les absences répétées ou prolongées du salarié protégé non liées à une maladie professionnelle, le Conseil d’Etat exigeait que l’Inspecteur du Travail s’assure, entre autres, que l’employeur avait préalablement tenté de reclasser ce dernier.

A l’occasion d’un litige concernant l’autorisation de licencier une assistante de communication d’une fédération sportive exerçant les mandats de déléguée du personnel et de déléguée syndicale délivrée par l’Inspecteur du Travail, le Conseil d’Etat est revenu sur son ancienne jurisprudence par un arrêt du 9 mars 2016 (CE 9 mars 2016, n°378129).

En droit français, l’absence pour maladie non professionnelle ne peut justifier une rupture du contrat de travail sauf à ce que l’employeur:

  • démontre que l’absence prolongée du salarié ou ses absences répétées ont des répercussions sur la bonne marche de l’entreprise ; et
  • justifie de la nécessité de procéder à son remplacement définitif.

En ce qui concerne les salariés investis d’un mandat électif et/ou syndical, l’employeur devait, en outre, selon le Conseil d’Etat et l’Administration, justifier de l’impossibilité de reclassement préalable du salarié sur un autre poste.

L’obligation de reclassement mise à la charge de l’employeur s’inspire de celle existant en matière de préalable au licenciement pour motif économique ou pour inaptitude physique.

Cette obligation n’était, selon nous, pas justifiée dans les hypothèses d’une absence pour maladie non professionnelle, dans la mesure où c’est précisément le trouble objectif causé à l’employeur par les absences du salarié et non l’état de santé de ce dernier incompatible avec son poste de travail qui est à l’origine de la demande d’autorisation de rupture du contrat de travail.

Dans son arrêt du 9 mars 2016, le Conseil d’Etat revient à plus de raison en n’exigeant plus de l’employeur une obligation de rechercher une solution de reclassement dans ce cas de figure.

La plus haute juridiction administrative précise qu’en cas de demande d’autorisation de licenciement, le contrôle de l’Inspection du Travail devra uniquement porter sur les points suivants :

  • l’absence de lien entre la demande d’autorisation de licenciement et le mandat électif et/ou syndical du salarié ; et
  • la réalité et l’importance des absences répétées ou prolongées du salarié sur le bon fonctionnement de l’entreprise ; et
  • la nécessité de procéder au remplacement définitif du salarié.

L’Inspecteur du Travail devra également, le cas échéant, tenir compte des stipulations de la convention collective applicable prévoyant une garantie d’emploi pendant une certaine durée au profit des salariés.

On peut s’interroger sur la portée de cette décision rendue par le Conseil d’Etat en matière de licenciement pour insuffisance professionnelle des salariés protégés. En effet, pour l’heure, l’employeur est toujours tenu de rechercher des solutions de reclassement, s’agissant du salarié protégé dont le licenciement pour insuffisance professionnelle est envisagé.

Le Conseil d’Etat décidera-t-il d’aligner, là aussi, sa jurisprudence en la matière avec la position de la Cour de cassation ? Rien n’est moins sûr, compte tenu du fait que la recherche par l’employeur d’un poste plus conforme aux compétences du salarié protégé peut caractériser l’exécution de bonne foi du contrat de travail.

L’expertise de Reed Smith L’équipe social de Reed Smith à Paris dispose d’une solide expertise en droit du travail tant en matière de conseil que de contentieux. Séverine Martel, associée, dirige une équipe de 3 personnes dédiées tant aux problématiques individuelles que collectives des relations du travail. L’équipe se tient à votre disposition pour vous faire part de leur expérience et répondre à vos questions.