Auteurs: Benoit Charot

Deux personnes morales de droit privé françaises peuvent, d’un commun accord, rédiger leurs documents contractuels en langue anglaise.

Le 30 mai 2016, la Commission d’examen des pratiques commerciales (ci-après « CEPC »), instance consultative placée auprès du Ministre de l'Economie et chargée de veiller à l'équilibre des relations commerciales entre producteurs, fournisseurs et revendeurs au regard de la législation en vigueur, a rendu un avis relatif à l’emploi de la langue française dans les documents contractuels.

Interrogée sur la possibilité pour deux sociétés françaises d’avoir recours à la langue anglaise dans leurs relations contractuelles, la CEPC a répondu par l’affirmative dans la mesure où cette langue était dûment acceptée par les deux parties.

La CEPC a rappelé que l’article 2 de la loi du 4 août 1994 rendait obligatoire l’emploi de la langue française dans « la désignation, l'offre, la présentation, le mode d'emploi ou d'utilisation, la description de l'étendue et des conditions de garantie d'un bien, d'un produit ou d'un service, ainsi que dans les factures et quittances » mais que la circulaire d’application de cette loi du 19 mars 1996 précisait cependant que « les factures et autres documents échangés entre professionnels, personnes de droit privé françaises et étrangères, qui ne sont pas con sommateurs ou utilisateurs finaux des biens, produits ou services, ne sont pas visés par ces dispositions ».

La CEPC en a donc déduit que « il n’[était] pas interdit à deux personnes morales de droit privé françaises de rédiger leur contrat en langue anglaise ».

L’avis de la CEPC, dont il faut préciser qu’il n’est pas contraignant même s’il peut avoir une influence certaine sur les juridictions, va dans le sens de la jurisprudence actuelle mais apporte une précision sur le fait qu’une langue étrangère puisse être choisie par deux sociétés, quand bien même ces dernières seraient toutes les deux françaises.

La CEPC prend le soin de rappeler tout de même que les contrats rédigés en anglais devront obligatoirement être traduits en français dans le cadre de procédures judiciaires en France. Ainsi, il n’est pas à exclure que des difficultés d’interprétation viennent à surgir dans le cadre d’un litige soumis aux juridictions françaises.

Il paraît également important de rappeler que cette liberté dans le choix de la langue contractuelle ne vise que les relations entre professionnels et non celles entre professionnels et consommateurs.

On peut également douter de la force qui sera accordée à des conditions générales en langue étrangère, particulièrement si la maîtrise par l’autre partie de la langue utilisée ne parvenait pas à être démontrée.

Enfin, il convient d’attirer l’attention sur le nouvel article 1127-1 du Code civil, applicable à partir du 1er octobre 2016, qui impose à tout professionnel proposant par voie électronique la fourniture de biens ou la prestation de services, de préciser dans son offre les langues proposées pour la conclusion du contrat, au nombre desquelles doit impérativement figurer la langue française.

L’expertise de Reed Smith L’équipe contentieux de Reed Smith à Paris dispose d’une réelle expertise en contentieux commercial. Dirigée par Benoît Charot, composée de trois associés, un counsel et six collaborateurs, elle conseille ses clients français et internationaux pour mettre en place des stratégies visant à minimiser leurs risques de responsabilité et prévenir les contentieux comportant des enjeux significatifs. L’équipe se tient à votre disposition pour vous faire part de leur expérience et répondre à vos questions.